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Au presque quotidien
21 février 2013

dents II

Je savais que ça n'allait pas être triste. Que j'allais rigoler comme un malade mental. Que j'allais m'esbaudir la bouche ouverte. Je tremblais comme une feuille - pourtant, je suis assez résistant à la douleur. Elle - ma dentiste - me dit que je ne sentirai rien. Elle avait raison: je n'ai rien senti. D'ailleurs, mon nez était bouché. Mais j'ai entendu. C'est pire! Ces bruits de scie, ces vrillements, ces vibrations qui emportent le crâne, ces couics de pince, ces mots " je vais l'avoir, juste un petit effort". "Petit effort"! Tu parles! Elle transpirait comme un marathonien au travers du bush australien, en plein été. Je me suis même demandé si elle n'allait pas se rendre à la menuiserie voisine demander un marteau et un burin tellement les racines collaient à l'os. L'affaire faite, j'avais maigri de quatre grammes. Toujours ça de pris. Mon portefeuille avait maigri, lui aussi. Le pire: elle m'avait foutu dans tampons et je ne pouvais plus ouvrir la bouche (pas parler, pas boire, pas fumer) pendant quatre heures! Elles viennent de s'écouler. Je peux parler mais personne n'est là pour écouter. Je peux boire, mais il faudrait que j'aille au magasin. Je peux fumer (très peu, m'a-t-elle dit car la nicotine empêche une bonne cicatrisation) mais je n'ai plus de tabac. Et puis je me retrouve à devoir manger de la purée pendant trois jours au moins. Et de la panade le matin (betterfood, banane écrasée, jus d'oranges). Comme si la vie était un cercle: je me retrouve 60 ans en arrière, lorsque je n'avais pas de dents. Dans trois ans, maman me reprendrait-elle dans son ventre? J'ai subitement froid. Il neige sur mon village, avec parcimonie. Il neige gentiment: un flocon qui vient de là où les dents n'ont aucune importance.      

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