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Au presque quotidien
2 mars 2013

joue

Un arbre à abattre, presque mort, envahi par le lierre. Trente mètres de haut, plus d'un mètre de diamètre à la base, en bordure de route (une école maternelle de l'autre côté), un emberlificotement de fils électriques dans ses branches. "Ce ne sera pas simple" dis-je au propriétaire. "Qu'à cela ne tienne, je n'ai pas les moyens financiers, buvons donc un coup". J'avais avancé la somme de 3500 euros (en ce compris le blocage de la route - très fréquentée - pendant la journée, la coupure de toutes les installations électriques, l'espoir que l'on puisse faire le travail un week-end (pas d'enfants dans l'école mais certaines communes interdisent l'usage de machines à moteur dans les jardins les samedi et dimanche), le surcoût d'assurance "Responsabilité civile" que représente ce genre de travail professionnel etc etc). Nous n'avons pas bu qu'un coup car son vin était très bon... et son cognac aussi. Un peu plus tard, j'étais invité à l'anniversaire d'une amoureuse. Restaurant restauré, champagne et carte! Je m'étais mis sur mon 42, pour faire bonne impression. La carte était simple, voire simpliste. Toujours dans les brumes de l'arbre, du vin, du cognac et du champagne, alors que je déteste l'idée même de manger des abats ou des tripes, je commandai des "Joues de porc accompagnées d'un confit d'échalotes aux petits raisins". Autant je ne visionne absolument pas la patte de l'agneau lorsque j'achète un gigot ou la carcasse d'un boeuf chevalin lorsque que je dépose un steak sur mon assiette; autant je ne m'émeus pas du cri des asperges lorsqu'on extirpe leurs turgeons ni de leur douleur lorsqu'elles sont plongées dans l'eau bouillante, autant là, dans ce restaurant, j'ai vu les joues rosées du petit cochon. Ce n'était pas mauvais, non. Franchement. Mais je n'ai pas pu "finir mon assiette" comme m'obligeaient mes parents quand j'étais petit. Comme si je sentais le scalpel du boucher dans cette chair très tendre. Comme si je voyais les yeux de la bestiole entre ses deux joues. C'était atroce. Et j'ai très mal dormi, ayant en tête, aussi, cette phrase d'Eric Chevillard (Je crois et je cite de mémoire): "dans le cochon, tout est bon. On peut même insérer la fiche du four dans son groin". Je me suis éveillé avec des haut-le-coeur. Pas pu prendre mon petit-déjeuner. Une tasse de café: ce fut bon. Ma journée va être morose, je le sens. Aujourd'hui: légumes, légumes et rivières d'eau. J'espère que les poissons seront absents. 

     

 

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